Thérapies intégratives

Thérapies intégratives

Concilier la psychanalyse, les thérapies comportementales et la méditation, les séances en individuel et en groupe… C’est la vision « intégrative » qui se développe en France pour mieux répondre aux besoins spécifiques de chacun. Le point sur une notion pas toujours bien comprise.

 

 

Un nouveau courant est en train de s’imposer en France : celui de la psy « intégrative », qui recherche les points communs entre les différentes tendances et met l’accent sur leur complémentarité. Il s’appuie sur le constat qu’aucune technique n’est suffisamment complète ni suffisamment bonne. « Intégrer » (du latin integrare) signifie rendre complet, entier, unifier. C’est, par exemple, considérer qu’un travail thérapeutique sera plus productif si le savoir acquis à l’aide d’une thérapie verbale, analytique, est vécu, mis en acte grâce à une thérapie émotionnelle, cognitiviste, ou à des exercices d’affirmation de soi. Intégrer, c’est aussi faire des choix : quelle technique, quel travail proposer à ce patient-là ? « Il ne s’agit pas d’une nouvelle école ni d’une nouvelle méthode, expose Alain Delourme, psychologue, psychothérapeute et formateur de praticiens, qui s’inscrit dans ce mouvement. Il s’agit de prendre en compte l’être dans sa globalité – le corps, les émotions, la pensée, la spiritualité, le passé, le présent, l’avenir. C’est un état d’esprit, une volonté d’ouverture qui vont inclure les cultures anciennes, le yoga, la méditation. Il faut en finir avec les querelles de chapelles. Les confrères ne sont pas des ennemis. »


Une volonté d'unification

A découvrir

 

Olivier Chambon, psychiatre et psychothérapeute intégratif est une des figures de la psychothérapie transpersonnelle. Retrouvez notre entretien dans notre article Olivier Chambon : "La thérapie doit aussi prendre en compte l'âme"

Aux États-Unis, l’intégration des approches thérapeutiques est déjà une vieille histoire, qui débute dans les années 1930. Aujourd’hui, un tiers des psys américains se réclament exclusivement de ce courant. Selon Françoise Parot, professeure d’épistémologie et d’histoire de la psychologie, c’est la vision américaine de la psychanalyse – pragmatique, visant l’adaptation (alors qu’en France elle a toujours été perçue comme un exercice intellectuel de haut vol) – qui a permis très tôt une alliance avec les thérapies cognitivo-comportementales et les thérapies « humanistes » – comme la gestaltl’analyse transactionnelle ou l’approche centrée sur la personne de Carl Rogers. En France, nous préférons les belles idées et les théories pures aux solutions pratiques, d’où les résistances face à l’intégratif, longtemps jugé trop peu rigoureux. Parmi les principaux arguments contre ce courant, le rappel que chaque grande approche thérapeutique porte avec elle sa vision particulière du monde et de l’homme. Et que, par conséquent, il n’est pas sérieux d’espérer les faire cohabiter… C’est à la fois vrai et faux, explique l’Américain Stanley Messer, professeur de psychologie clinique à la prestigieuse université Rutgers (New Jersey). « Les méthodes humanistes voient la vie et la thérapie comme une quête aventureuse : le patient est un héros en voie de libération qui va retrouver son être unique et merveilleux, sa vraie nature, son authenticité », écrit-il. La psychanalyse partage cette vision romantique quand elle nous invite à explorer notre part cachée, nos rêves, nos fantasmes, à la manière d’un voyage vers soi-même. Mais, au terme de l’aventure, nul triomphalisme. Le chemin débouche sur une nécessaire résignation (une « castration », en langage lacanien) : le bonheur absolu est impossible et la vie en société est forcément frustrante.

Cette perspective a de quoi horrifier les praticiens des thérapies humanistes, qui insistent sur la bonté de l’homme, son formidable potentiel d’amour et de richesse. Pragmatiques, orientées vers la solution, les thérapies cognitives et comportementales, très utilisées dans le traitement des phobies et des conduites anxieuses, n’ont à la base rien de romantique. Pour elles, la guérison est essentiellement affaire d’apprentissage des conduites et raisonnements adéquats. Pourtant, au fil des années, ces courants, grâce à leurs échanges, ont évolué dans leur vision de l’existence. « Influencées par les méthodes humanistes, les thérapies cognitivistes et comportementales sont devenues plus “humaines”, prenant davantage en compte les conflits affectifs du patient, nous apprend Stanley Messer. Les praticiens de la thérapie d’orientation analytique sont aussi devenus plus empathiques. Les thérapies humanistes, en revanche, n’ont pas cédé sur leurs idéaux de bonté et de beauté. »


Une création au quotidien

Les psychothérapies se transforment entre elles. Et comment nous transforment-elles ? Si l’approche intégrative est toujours centrée sur le patient et privilégie l’ouverture à l’ensemble des disciplines oeuvrant à connaître l’humain et à le soigner, tous les thérapeutes n’ont pas la même idée de la façon dont ils doivent exercer leur métier. Pour Olivier Rouzet, psychopraticien lyonnais qui propose des thérapies individuelles et de couple (seuls les psychologues et les psychiatres ont droit au titre de psychothérapeute), par exemple, c’est l’état du patient qui détermine au jour le jour la stratégie thérapeutique à adopter. Un patient anxieux sera probablement plus réceptif à une séance d’hypnose guidée où il visualise des scènes de bien-être qu’à un lourd travail émotionnel ou de régression vers son enfant intérieur. « Je m’adapte, je me demande ce qui pourrait l’aider, précise-t-il. Je n’hésite pas à donner des conseils, à prescrire des “devoirs à la maison” entre les séances : écrire, réfléchir à telle ou telle problématique personnelle. »

Alain Gourhant, psychopraticien parisien, propose, lui, un parcours en trois grandes étapes. « Lorsque la personne commence à consulter, elle tend à intellectualiser son problème, à se couper de ses sensations, note t-il. Il faut d’abord lui en faire prendre conscience, lui apprendre à les apprivoiser – par des techniques de libération émotionnelle, des approches psychocorporelles. » Dans un deuxième temps, le patient est invité à explorer sa vie inconsciente, en particulier l’origine de ses symptômes, par des techniques de régression, l’hypnose notamment. La dernière étape est celle de la « réunification intérieure » : donner du sens à sa vie, se centrer – par la méditation, des techniques énergétiques (yoga, qi gong). « Je ne sais jamais vraiment à l’avance comment va se dérouler une séance, commente le psy. La psychothérapie est un art. Comme un peintre, le thérapeute se laisse inspirer par son sujet, en l’occurrence ici son client. »

Pour Alain Delourme, être psychothérapeute intégratif, c’est être capable d’entendre son patient avec plusieurs références théoriques. À certains, il propose un travail à dominante analytique. À d’autres, une technique axée sur les émotions. Très souvent, le parcours associe séances individuelles et en groupe, avec du psychodrame (jeux de rôles thérapeutiques dans lesquels les participants sont invités à mettre en scène leurs conflits intérieurs, comme au théâtre). « Parfois, j’aide les patients à explorer leur vécu infantile ; à d’autres moments, nous allons envisager leur futur, leurs projets », confie-t-il. La relation patient-thérapeute est le moteur de toutes les approches. Mais, en psychothérapie intégrative, la qualité de l’alliance thérapeutique est essentielle. « Le praticien et son patient travaillent ensemble pour comprendre la situation et trouver des solutions », observe Olivier Rouzet. C’est-à-dire que le thérapeute admet que son patient est le meilleur expert de son propre « cas » : un net progrès si l’on pense à l’époque pas très lointaine où les psys se croyaient obligés d’être distants et muets comme des carpes. Faut-il pour autant se précipiter chez un thérapeute intégratif ? « Rien ne prouve qu’une thérapie classique ne soit pas aussi efficace, admet Alain Delourme. Personne ne dit que cette approche est plus performante qu’une psychanalyse freudienne. J’insiste : c’est un état d’esprit. »

 

source : http://www.psychologies.com/Therapies/Toutes-les-therapies/Psychotherapies/Articles-et-Dossiers/Tout-ce-que-vous-devez-savoir-sur-la-psy-integrative


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